lundi 25 juillet 2011

Curieuses papilles

Menu coquin


Préliminaires variés et mises en bouche
Galipettes grivoises avec sa sauce piquante 
Poêlée de cœurs d’artichauts
Tentations et mignardises

Menu frileux (peut éventuellement se combiner avec le menu précédent)

Oreillers sur lit de saumon 
Langueurs du jour sous sa couette chaude 
Pommes en robe de chambre 
Profiteroles de moelleux

Menu du lecteur


Terrine de campagne  Maupassant sauce normande
Poularde Dumas façon reine Margot
Millefeuilles au fenouil et sa salade de poèmes
Duchesses de Guermantes et bêtises de Combray

Menu du musicien


Prélude de chopinettes
Opéra-bouffe sur tournedos Rossini
Concerto pour céleri et brocoli
Chaconne comme Bach

Menu du cinéphile


Générique de foie gras Visconti
Pièce du boucher à la Chabrol
Carottes cuites au grisby
Galopins nappés de pulp fiction

jeudi 14 juillet 2011

Une saison à Londres

Pourquoi écrire sur l’Angleterre ?
Why not ?

Parce que c’est d’abord une love story 

Parce que l’ambivalence est toujours source d’un peu de mystère….

Quand j’étais adolescente, l’Angleterre m’apparaissait comme une terre d’évènements, de liberté, de rencontres, bien loin de mon univers de banlieue.

Quand j’ai découvert la littérature anglaise, d’abord par des romancières, elle me semblait, et c’est toujours vrai, inépuisable… et cette admiration n’a fait que croître et s’élargir.

Le lien s’est distendu ensuite sans jamais se couper. Mais mon amour en a pris un sacré coup l’été 1997. J’étais partie avec des images encore littéraires

Ces Anglaises chez lesquelles nous avons loué des « bed & breakfast » avaient presque toutes des chats et bien d’autres caractéristiques communes, en particulier celle d’être maniaques et obsessionnelles. Elles ressemblaient pour certaines d’entre elles à l’héroïne du livre d’Elisabeth Taylor que je venais de lire, une femme peu troublée par la mort de son mari, qui devenait féroce dès qu’on la perturbait dans ses habitudes...(Le cœur lourd )
C’est une vision très partielle, et partiale certainement, de cette partie de l’Angleterre à des années-lumière des films de Ken Loach. Dans la région où nous sommes allés, tout était vert et propret, pas de chômeur à l’horizon de cette campagne pour décor de théâtre, pas de travailleur immigré, et très peu de touristes, car les prix étaient plus élevés, chez l’habitant, que dans des hôtels de grand standing partout en Europe (le premier soir, sous la pluie, la première enseigne B&B proposait deux chambres couleur layette pour 900 Frs. la nuit, oh ! my God ! j’ai cru avoir une british syncope).

Elles avaient aussi des bibelots à profusion; un objet m’a particulièrement frappée, c’est une petite chose molle mise devant les portes pour les laisser ouvertes, par exemple une grenouille flasque remplie de petites billes croassantes, ou un canapé miniature avec les petits coussins cousus assortis, pouah!

Ce marché des horreurs a eu d’ailleurs de beaux débouchés avec le mariage princier, et hélas si ce n’étaient que gadgets pourris…

« Dans le Berkshire donc, prévaut la volupté d’être anglais, de droite, défenseur des vieilles valeurs-patrie, travail, monarchie ».[1] J’aimerais ne pas avoir à dire le Beurkshire….

Mais je m’égare, retour sur le plaisir de lire et celui de la découverte, je viens de finir Haute société  de Vita Sackville-West, je voulais continuer avec Dark island , je croyais qu’il n’existait pas en français et j’ai appris par une blogueuse (Lily et ses livres) qui apprécie beaucoup la littérature anglo-saxonne qu’il venait d’être traduit, it’s good, isn’t ?

Les romancières anglaises ! on cite toujours Jane Austen et les sœurs Brontë, mais certaines sont ignorées de leurs compatriotes, comme Lettice Cooper, très peu connue en France avec seulement deux ouvrages traduits. Une journée avec Rhoda est un des plus merveilleux livres que j’ai lus (il y a longtemps et je me souviens fort bien de cette analyse dans la dentelle de la disparition d’une classe sociale à travers le prisme des relations familiales lors d'un déménagement).  
Quant à Elizabeth Taylor, elle a peut-être été éclipsée par sa célèbre homonyme , on a un peu parlé d'elle quand Ozon a fait le film Angel .

Et je ne pourrai les nommer toutes, les Anne Fine, Anita Brookner, Elisabeth von Arnim, Barbara Pym, Angela Huth, Rose Tremain, Agatha Christie, … quelques hommes dans ce lot, Forster, bien sur, avec Route des Indes et Maurice, Oscar Wilde et aussi John Fowles, parce que Sarah et le lieutenant français est le livre que j’ai le plus relu. 

Je ne vais pas laisser dans l’ombre les Américaines et surtout Edith Wharton, dont j’ai apprécié Le temps de l’innocence, La récompense d'une mère, Chez les heureux du monde,... J’avais dit dans ce blog que je savourais l’idée de relire ce dernier, en fait pour la troisième fois, eh bien ce sera peut-être aussi la dernière, car le personnage de Lily Bart m’a tellement émue et brassée, deviendrai-je plus sentimentale en vieillissant ? Je crois surtout que l’idée de cette femme qui sait tout ce qu’il faut faire pour arriver à ses fins, et ne peut s’empêcher de se mettre en échec car si elle veut faire partie de cette société huppée elle en refuse aussi la plupart de ses codes, a quelque chose de vraiment triste et pathétique.

Bien sur il y en a d’autres, Joyce Carol Oates, une boulimique de l’écriture, je n’aime pas tout…je viens de lâcher en route La fille tatouée , trop manichéen, je préfère Blonde et Les chutes, Siri Hustevdt, j’ai aimé tous ses livres (je n’en dirai pas autant de ceux de son célèbre mari), Jane Smiley, Barbara Kingslover, Laura Kasischke…

Pour les hommes, Colum Mc Can (Les saisons de la nuit), Ian Mc Ewan (presque tout), Russel Banks (je suis une inconditionnelle), Tom Wolf (Le bûcher des vanités….  pauvrette, de se voir si haut perchée elle se croyait au moins aussi haute que le monde !  on parle ici de la chèvre de M. Seguin, toute ressemblance avec un personnage réel ne peut être que fortuite…), un livre qui m’a envoûtée littéralement,  Accouplement,  de Norman Rush, mais j’ai calé au deuxième, et toute ma gratitude à Michael Connelly pour les heures  passées avec Harry Bosch. 

J’ai omis une grande de la littérature anglaise mais je vais l'avouer, oui j’ai peur de Virginia Woolf, j’ai quatre livres dans ma bibliothèque et pour l'instant le déclic ne s'est pas fait...

Cela me rappelle les engueulades avec des copines il y a fort longtemps à propos de Marguerite Duras ; il y avait celles comme moi, qui se satisfaisaient des histoires du Marin de Gibraltar et de Barrage contre le Pacifique, et il y avait les inspirées, les durascuires, qui savouraient avec des mines gourmandes et dédaigneuses pour les non initiées Le ravissement de Lol. V. Stein et Détruire dit-elle….

Pourquoi cela m’agaçait tant ? peut-être car cela laissait entendre que je n’avais pas compris ce qu’il y avait à comprendre…pas perçu le sens de cette œuvre réservée à ceux qui avaient la clef !

Il faut clore cette page déjà longue sur des écrivains que j’aime, car je pourrais en rajouter sans cesse et c’est comme les exclamatifs et superlatifs italiens, transition pour la prochaine destination perche no l’Italie ?




[1] Article du Monde du 22 avril 11, le Berkshire étant la région natale de la « princesse »

jeudi 7 juillet 2011

Voyage dans le cocasse

Le cocasse, l’insolite, le pittoresque…

Cela me rappelle une petite blague idiote, la maîtresse propose une rédaction « racontez avec pittoresque une promenade en forêt », et l’élève qui commence ainsi : je me promenais dans les bois et au détour d’un sentier le pittoresque caché derrière un arbre m’a sauté à la figure


L’été 1996, nous étions à Gubbio, jolie ville fortifiée nichée dans une vallée des monts d’Ombrie, nous déjeunions dans la salle en sous sol d’un restaurant, nous avions commandé des pâtes, et l’inquiétude commençait à supplanter la faim, car nous trouvions que cela sentait le gaz, de plus en plus fort...  Et de commencer à nous dire que nous étions nombreux dans cette cave, et pour évacuer les lieux ce serait chaud!

L’odeur semblait amplifier à mesure que les assiettes fumantes arrivaient sur les tables. Quand ce fut notre tour, nous n’avions plus très faim, nous pensant condamnés, mais les quatre assiettes de pasta al tartuffo nous ont redonné de la vigueur quand nous nous sommes aperçus que le fumet de pâtes au gaz était celui de la truffe locale.

En 2003 départ pour l’Inde du sud, arrivée à Madras, exténuée après le retard du premier vol et les courses folles dans la nuit pour attraper les vols suivants…ma première impression d’étrangeté fut un panneau brandi dans l’aéroport indiquant qu’on recherchait Mr Siva Lingam !


Dans la cohue du souk d’Agra la vision d’une vache sur le balcon minuscule d’une maison… et plus au sud une autre prenant un bain dans l’Océan Indien.


A Haridwar, ville sainte au bord du Gange, un shadou hirsute et presque nu qui vivait dans un arbre, et dans le creux du tronc il avait une petite télé…

Dans un lieu de pèlerinage  jaïn , un vieil ascète Shvetambara (vêtu de blanc) se faisait nourrir par une femme qui lui mâchait la nourriture avant de la lui mettre en bouche… Et comme son unique vêtement ressemblait à une barboteuse, l’impression de régression était saisissante.

A Bombay un écolier richement vêtu avec toute la panoplie des marques occidentales enjambant un gamin des rues dormant sur le trottoir.


au coin de la rue à Ahmedabad
Tout cet insolite indien est inépuisable et ne l’est aussi que parce qu’il rompt avec nos habitudes et nos schémas mentaux.



Mais je mentionne cependant les 10km en rickshaw de Bénares à Sarnath car il ne s’agit plus d’impressions, j’étais réellement dans un jeu vidéo, j’en ressens encore les secousses.

Sur une aire d’autoroute, en France, j’ai entendu une femme dire à ses enfants  tation la gadoue  et j'imaginais un étranger parlant parfaitement le français cherchant désespérément de quelle langue il s’agissait ou même sorti du contexte un français perplexe devant ce virelangue inédit .

Spectacle  Germinal  au fort de Bron il y a une vingtaine d’années. Les spectateurs étaient assis sur des espaces restreints, chaque groupe visionnant une scène différente. Lors de celle montrant la fureur des femmes envers l’épicier, qui brandissaient son attribut viril, mon plus jeune fils s’est écrié « Mais qu’est-ce qu’elles lui ont coupé ? » et  le public, ravi de cette diversion (mais pas son frère), s'est tourné vers les parents, attendant de voir comment ils allaient répondre. Je n’ai d’ailleurs pas trop manié l'euphémisme car je crois me souvenir que mon fils a répliqué encore plus fort : mais c’est dégueulasse ! 

J’étais à Londres pour voir une amie partie vivre en Angleterre, un hiver des années 70, et le repas de Noël, même dans un squat, n’échappait pas à la traditionnelle dinde farcie. Je demande à mon voisin s’il en  veut encore et j’ai du employer une formule comme « do you want more stuffing ? », j’ai vu quelques sourires et regards à peine gênés, discrétion british oblige, et je n’ai compris qu’après (l’explication de mon amie), oh shocking ! que je lui demandais s’il voulait encore baiser…

Il n’y aura pas de dessert, le pudding attendra, car c’est la transition toute trouvée pour mon prochain texte, qui mijote depuis longtemps, bien avant la création de ce blog, et si j’en connais à peu près le contenu, mon amour rarement déçu pour la littérature anglo-saxonne, qui a éclos avec les romancières anglaises, il s’agit maintenant de trouver les mots pour le  partager !


En attendant voici une photo prise en 2005 à Udaipur « Les 2 Anglaises et le continent indien » tout droit sortie de la Route des Indes de Forster.





dimanche 3 juillet 2011

Brèves de quartier

Encore un mariage princier, un nouveau prince est appelé araignée…mais non c’était le père qui s’appelait Rainier, lui il s’appelle Albert comme tout le monde !

L’introduction n’a rien à voir avec la suite car le quartier dont je veux parler n’a avec le rocher monégasque que la caractéristique d’être touristique… maintenant surtout.

Il s’agit du vieux Lyon dont je présente quelques aspects de quand j’étais jeune

Nous habitions un grand appartement à côté de la ficelle (le funiculaire, plutôt les, car un « monte » à St Just, l’autre à Fourvière), la propriétaire, bourgeoise charmante, habitait la même allée.

J'étais sortie en début de soirée acheter un litre de vin à l’épicerie comptoir de la place de la Trinité, en bas du Gourguillon, ouverte tard le soir, avant que les épiciers Tunisiens prennent la relève.

Dans le fond du café il y avait une tablée de petits vieux (on ne disait pas encore personnes âgées ). La porte s’est ouverte et j’ai vu du remue-ménage dans le fond de la salle, une femme s’est levée, rajustant sa perruque qui avait glissé sous le coup de l’émotion, et s’est écriée « ben alors ça m' la coupe, père Dudu, pourquoi t’es descendu ? on s’en occupait bien de tes chats ! » et j’ai réalisé que le père Dudu était en pantoufles et pyjama, qu’il était certainement descendu, à pied bien sur, de l’Antiquaille (l’hôpital qui était en face du théâtre romain), qu’il voulait peut-être faire un dernier câlin à ses chats, et je suis restée bien bête avec ma bouteille de rouge à la main…

Le boucher de la même place était un sacré numéro, et si l’un de nous s’avisait de demander un petit steak, eu égard à nos finances, il avait intérêt à faire attention à l’intérêt que prenait le boucher à nourrir un solide gaillard et à lui refiler un gros pavé. Ce boucher entre un jour à l’épicerie d’en face et demande une menthe à l’eau, silence radio ; il réitère sa demande, une fois, deux fois, le silence s’installe, personne ne bronche…cinq minutes plus tard il lâche en maugréant « comme d’habitude » et là comme par magie le petit ballon de rouge apparaît sur le comptoir.

Rue St Jean il y avait aussi une épicerie tenue par les sœurs Chabert,  qui ressemblaient à des bonnes sœurs, toujours vêtues de noir et pas si bonnes  car elles étaient très radines. On était obligé  d’y aller pour changer la bouteille de gaz.

Une charcuterie, toujours dans la même rue, la grand-rue du quartier , et à peu près à l’emplacement du restaurant sur la photo ci-jointe (angle place Neuve/rue St Jean).
C’était plutôt bon marché et je me souviens d’un monsieur venu acheter un jour pour 70 centimes de couennes.

Toujours rue St Jean, un minuscule troquet tenu par une petite vieille toute sèche, un poêle noir ronflant au-milieu de la pièce, et la particularité de ce lieu, où ne venaient que des vieux (certainement des pays Ardéchois) était la relation très mystérieuse qu’entretenait la patronne avec Nasser car elle ne cessait de répéter : « ce Nasser il vaut pas un clou ! »

A propos de poêle, le nôtre, un magnifique Leau en fonte émaillée, trônait dans le couloir, et chauffait tout l’appartement. Et la réserve à charbon était dans la cuisine, polluant allégrement et c’était bien le cadet de nos soucis…