Sont dans un bateau… après la
copie musicale, l’envol d’écrits dans les bibliothèques, un petit tour
d’horizon, limité j’en conviens, sur le vol de phrases, paragraphes, pages
entières puisés ça et là qu’il est pourtant si facile de repérer aujourd’hui…
Le premier c’est Alain Minc
avec, cela ne s’invente pas, l’homme aux deux visages, destins croisés
de Jean Moulin et René Bousquet, et pour ce dernier il va largement au marché
dans la biographie de référence de Pascale Froment. Il pille carrément certains
passages et reprend allégrement à son compte des citations qu’elle avait
recueillies au terme d’une centaine de rencontres, d’entretiens et 600 pages
publiées.
Toujours le même auteur, Spinoza,
un roman juif, paru en 2001, avait bien
des airs de Spinoza, le masque de la sagesse de Patrick Rödal,
publié en 1997.
la parodie et le détournement délices de l'emprunt créatif
Le deuxième c’est un critique
littéraire médiatique, directeur du magazine littéraire, directeur-adjoint de
Marianne, Joseph Macé-Scaron dans son ticket d’entrée, qui traite des gloires
et déboires du monde de la presse. Ses déboires à lui ont commencé quand un lecteur
s’est aperçu, en prenant l’ouvrage de J.M.S., que certains passages, à peine modifiés, étaient dans le roman qu’il
venait de finir, American rigolos : Chroniques d’un grand pays de
Bill Bryson (il n’a pas du trouvé très rigolo d’être démasqué).
mais un bien bel endroit... |
"Aussi quand tu partis, Yvonne, j'allai à Oaxaca. Pas de plus triste mot..." personne ne plagie Au-dessous du volcan, ben pourquoi?
Le troisième est le rappel d’une
célèbre affaire, la bicyclette bleue de Régine Deforges contre les
ayants-droits du best seller de Margaret Mitchell, Autant en emporte le vent.
La première instance s’est
prononcé favorablement pour les ayants-droits, le juge ayant constaté une nette
ressemblance (l’intrigue, les personnages…).
touche pas à mon vélo! |
Les ayants-droits ont renoncé
aux poursuites après 2 jugements en cour d’appel et 2 en cour de cassation au
bout de sept années de luttes acharnées (ça c’est moi qui rajoute !).
Côté cinéma, j’ai déjà fait
allusion dans ce blog à Rivette qui n’avait pas noté son emprunt servile à
Henry James pour Céline et Julie vont en bateau. Cela a été rétabli de
nombreuses années plus tard. Pour L’effrontée de Claude Miller, je me
souviens d’une polémique, légère, comparée aux étripages actuels, peu après la
sortie du film. Il niait s’être inspiré de Frankie Addams de Carson
McCullers…là aussi c’est rétabli…la toile salit mais elle peut aussi blanchir
ou les deux à la fois.
Les producteurs et le scénariste
de Joséphine ont été accusés de plagiat et le plaignant veut faire
retirer le César du meilleur scénario, cela ne donne-t-il pas des idées de
scenariiiiiiiiiis…
J’imagine les ayants-droits,
surtout ceux qui se la coulent douce avec les rétributions d’œuvres célèbres,
je les imagine à l’affût, n’hésitant pas à payer une armée d’espions pour
débusquer d’éventuels copieurs, lisant d’interminables bouquins pour découvrir
sous les pavés le plagiat…
Je n'ai guère de sympathie non plus pour des gens comme Minc ou PPDA qui peuvent se défendre d'une lamentable manière en disant "c'est pas moi, c'est mon nègre qui a mal fait son boulot!".
J’ai encore moins de sympathie,
c’est même un euphémisme poli, pour le vol de la vie des autres. C’est à ce jeu
malsain que s’est prêté Christine Angot, dans un livre récidive, les petits.
Elle a été condamnée par jugement le 27 mai pour atteinte à la vie privée,
jugement remarquablement motivé (toujours les chroniques judiciaires de Pascale
Robert-Diard comme référence) ; il rappelle les deux principes
fondamentaux, celui du respect de la vie privée et celui de la liberté
d’expression, il souligne cependant que le plaignant (celui qui se plaint d’une
atteinte à la vie privée) doit établir que cette atteinte et le préjudice qui
en découle sont d’une « particulière gravité ».
J’ai emprunté la forme de ce qui
suit à une poétesse libanaise, Vénus Khoury-Ghata, dans son recueil « Je
pars en nuage »
De peur qu’elle n'oublie sa
promesse
Elle l’enferme dans une boite
De peur qu’on ne lui reproche
d’être gourmand
Il avale tout le pot de
confiture
De peur que ses fleurs ne
s’étiolent
Il leur chante sous la pluie
De peur qu’elle ne révèle son
secret
Il lui coupe la parole
De peur
que ses idées ne fuient
Il les
grave dans son cerveau
De peur que le loup ne le mange
L'agneau s'enduit de peinture noire
De peurs que ses rêves ne
s’envolent
Il leur
construit une cage dorée
De peur que cette nuit ne
finisse
Il accroche des étoiles au
plafond
Et convoque Shéhérazade
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