mercredi 21 décembre 2011

L’autre maison

J’ai toujours été fascinée par l’imposture, pas tellement les escrocs usurpateurs, plus par ceux qui ont la sourde conviction d’être des intrus, d’occuper une place non légitime, de jouer un rôle social qui n’est pas le leur…

Les impostures commises par d’autres m’ont un peu sidérée quand elles se dévoilent après un début idyllique comme celui-ci.

La première fois que j’ai vu Céline et Julie vont en bateau de Jacques Rivette, lors de sa sortie à Paris,[1], j’ai été enchantée d’être emmenée sur ces rives joyeuses et joueuses, et j’ai surtout apprécié quand les deux nénettes sucent leur bonbon et se retrouvent rue du Nadir-aux- Pommes dans cette étrange maison avec des personnages inquiétants, trois adultes autour d’une fillette.

Plusieurs années après j’ai acheté un livre d’Henry James (éditions de la Différence, 1987),  il fallait découper les pages de cet ouvrage intitulé L’autre maison, je dévoilerai ici juste l’intrigue de départ : une jeune femme mourante fait jurer à son mari qu’il ne se remariera pas tant que leur fille sera vivante (Heny James c'est encore plus tordu que Perrault!).


Bien plus tard, je revois Céline et Julie à Lyon, seule, pour la troisième fois, et je m’apprête à savourer ma madeleine comme le bonbon des héroïnes. Très vite un sentiment de malaise s’insinue en moi, je trouve certains aspects pénibles, particulièrement la gouaille trop appuyée de Juliet Berto, la vulgarité de la scène du square… et surtout je réalise que tous les passages extraordinaires du Nadir-aux-Pommes sont littéralement le bouquin d’Henry James ; j’écarquille les yeux pendant le générique, nada, il a trouvé ça tout seul…je n’ai pas voulu en faire un fromage, j’étais surtout déçue, la nouvelle vague recelait aussi quelques écumes boueuses !

Depuis il a du reconnaître ses influences (Internet le grand inquisiteur ?) car j’ai lu dans une critique que le film s’inspire de deux bouquins d’Henry James, l’autre bouquin je ne vois pas bien comment, l’autre maison apporte déjà pas mal d’éléments substantiels…


N’empêche, je me souviendrai avec plaisir de la première vision de Céline et Julie, quand je ne savais rien, je ne vais plus voir les films de Rivette, mais n’avais-je pas tout abandonné me retrouvant dans un petit ciné (le cinématographe à Perrache) pendant près de cinq heures pour L’amour fou



[1] Je précise car le film projeté à Paris en 1974 n’est sorti que 18 mois plus tard à Lyon, je l’ai revu à ce moment là entraînant une flopée de gens dans mon enthousiasme juvénile et naïf.

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